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Août 25, 2023 - livres    No Comments

Balancez les noms de vos romans feel good préférés !

Allez, tout est dans le titre !
Je sors d’une période d’émulation assez intense émotionnellement (cf. l’article Coups de foudre d’écriture chapitre 1 : Rodrigue/Intenable et chapitre 2 : Apes O’Clock).
Insomnie, écriture, insomnie, écriture, etc. Comment fait-on pour dormir déjà ? Et pour marcher ? Merde, faut nourrir les Seigneurs-Chats avant qu’ils s’entre-dévorent… Comment ça un nouveau chat a débarqué ? Comment ça c’est une Dame-Impératrice-Féline ? Quoi le ménage ? La vaisselle ? La peinture ? Oooh on verra ça plus tard, t’inquiète !

Mon cerveau a dit stop et sature tout autant qu’en début d’année. Alors, j’ai laissé la couette me happer et celle-ci ne veut plus me lâcher. Alors entre dodo, méditations, yoga, dodo, insomnies, écriture (un poil, il faut bien), dodo… je lis des romans feel good qui reposent mon cerveau et font du bien (tout est relatif) à mon petit cœur. Mais promis je me rattrape bientôt avec Corine Sombrun, Mon initiation chez les chamanes – Une Parisienne en Mongolie, Ovidie, La chair est triste, hélas ! et Noémie Delattre, Journal de mon cul et de mon cœur que j’ai délaissé depuis le mois de mai…

Saturation cognitive = respecter son rythme

Mon esprit en compote m’a donc orientée vers des lectures simples et qui sont autant de baumes pour les cœurs brisés et les esprits fatigués. Alors oui, c’est sûr, il y a souvent de sacrés poncifs, des évidences qu’on aimerait ne pas relire, ne pas revoir autant, mais je pense qu’il est malheureusement nécessaire de répéter les bonnes choses et les choses les plus évidentes pour qu’elles puissent rentrer dans les caboches. Du type :

  • agir avec amour est plus puissant qu’agir avec peur,
  • prendre le temps de respirer et contempler,
  • s’émerveiller,
  • s’ouvrir à ses désirs profonds, ceux qui animent l’âme et qu’on refoule.

Lire du feel good, parfois, c’est se réorienter vers soi, s’offrir un cocon de douceurs moelleuses et savoureuses pour se reconstruire. C’est apaiser un cerveau trop agité et passer un baume chaleureux sur un cœur brisé. C’est canaliser un esprit exalté à l’excès. C’est retrouver peu à peu ses mécanismes de réflexions pour offrir un sourire sarcastique aux réflexes archaïques qui se mettent en place actuellement dans nos sociétés capitalistes à bout de souffle.

La BD en réponse à l’agitation mentale

En général, maintenant que je connais le fonctionnement de mon esprit dissipé, je sais que pour revenir à mes amours littéraires, je dois d’abord passer par la case BD (entendez la BD au sens global de livres qui mêlent images et textes et qui va de la bande dessinée franco-belge aux romans graphiques et comics en passant par les mangas et les albums jeunesse).
Cependant, en juin-juillet je n’ai pas lu énormément et la BD n’a pas été mon refuge. J’ai uniquement parcouru Les Gueules Noires de Domon et Zampano.
Récit à propos de la création d’une équipe de foot sur un ancien puits de mine et qui ressoude tout un quartier face à une entreprise qui veut démolir le lieu pour y construire une rocade. L’histoire, imprégnée de revendications sociales, m’a rapidement emportée, bien que je n’aie pas adhéré au graphisme du livre. La thématique de la lutte contre l’oppression présente dans cette lecture me donne envie de me replonger dans la série Les Vieux Fourneaux de Lupano et Cauuet ❤.

Seconde étape de récupération des facultés de concentration : les romans

J’ai d’abord été un poil (euphémisme) déçue par La Chambre des merveilles de Julien Sandrel qui est ponctué de clichés sur les femmes, ça m’a hérissé les poils que je tente d’arborer fièrement. La vie est trop courte pour s’épiler la… (clin d’œil à Malice)
L’histoire est mignonne, touchante, mais j’ai presque honte (mon âme littéraire se tord) de dire ça : j’ai préféré le film… oui, il a plus d’énergie, d’émotions que le bouquin. Sans vouloir tomber dans la caricature binaire féministe, ça se sent que le livre est écrit par un homme cis-genre blanc… et c’est bien dommage pour un roman de ce type.

Puis, je suis passée à Respire de Maud Ankaoua. Elle m’avait conquise avec Kilomètre Zéro et celui-ci est dans la même veine. J’ai respiré en lisant ce roman et c’est exactement l’effet que je lui demandais. Bon, j’avoue, je ne me souviens plus du tout de la trame. C’est un de mes défauts, j’oublie un livre dès que je l’ai terminé. Si je vous dis que je me souviens uniquement que le personnage central du roman est un homme et… et c’est tout en fait, vous me croyez ? J’ai du relire la quatrième de couverture pour me remettre l’histoire en tête.
Et donc, sans vous dévoiler la trame, Respire est un roman qui invite à profiter de chaque instant comme s’il était le dernier, à embrasser sa vie pleinement, à ressentir ses émotions et à identifier ses besoins, à vivre en toute authenticité en apprenant à s’apprivoiser, dans la générosité et la bienveillance.

Entre deux feel good, je me suis arrêtée sur La Cicatrice de Bruce Lowery, que je voulais lire depuis très longtemps. Il s’agit ici d’un roman sur les turpitudes de l’enfance, sur la différence, sur la discrimination et le harcèlement scolaire. C’est un petit roman dur, mais très émouvant. Les personnages (enfants pour la majorité) sont emprunts d’une justesse à couper le souffle. Il est, je pense, dans la veine de La Guerre des Boutons et autres livres de ce type.

Pour finir juillet en beauté, le tour est venu du roman Les Mémoires d’un chat de Hiro Arikawa. Mon coup de cœur. J’aime le côté méditatif du road trip japonais avec le matou embarqué. C’est doux, c’est mignon. Seul bémol, mon esprit usé à du mal à saisir quand c’est un narrateur humain ou le chat qui raconte. Un petit effet de typo aurait allégé ma charge de lecture. 😉
Même si une partie est si triste que j’en ai versé des larmes qui nettoient l’âme à n’en plus finir, j’ai beaucoup aimé ce roman ponctué d’amitié, de chaleur humaine, de taquineries félines, de douceurs et d’explorations du Japon. Il ne faut donc pas avoir peur de se confronter à ses émotions pour se laisser nettoyer en profondeur. C’est une lecture qui dorlote les âmes endeuillées.

Et là, je viens d’entamer (et presque terminé) le sardonique (pour le moment) Un jour de David Nicholls qui cisèle les relations amoureuses comme on affute le fil d’une lame émoussée. Les deux protagonistes amoureux sont touchants de réalisme dans leur impossibilité à se retrouver au fil des années, dans le tumulte des rencontres qui ponctuent leur amitié amoureuse. Pour l’instant, c’est un bon feel good de type comédie romantique. Mon cœur tout mou se laisse bercer par les tempêtes triviales qui touchent les deux protagonistes… Par contre… tout se passe un 15 juillet (wtf! Pourquoi encore cette date ?) !

Blob, mon amour…

J’ai profité de ce temps pour également terminé l’excellentissime… ovni de la littérature Moi le blob, de ma rock star préférée Audrey Dussutour (non, elle ne fait pas de musique, quoique… le blob est tellement surprenant qu’il est capable de composer de la musique. Vous ne me croyez pas ? Fouillez !😅) et illustré par Simon Bailli. J’avoue que je ne sais pas dans quelle case ranger ce livre. On est à la croisée des chemins du comics/roman graphique de vulgarisation scientifique, du reportage journalistique, du journal et du manuel de cuisine… oups d’expériences scientifiques. Largement documenté (normal, l’autrice, directrice de recherches au CNRS, est également la spécialiste française du blob), cet ouvrage vous embarque dans l’histoire du blob, racontée par lui-même. Un régal que j’ai dégusté pendant plusieurs mois pour nourrir le tome 2 des Aventures d’Augustine Baudelaire qui tarde à émergé de mon esprit embrumé (le tumulte de la vie, tout ça tout ça).

Pour le mois d’août, je me suis sorti L’année du singe de Patti Smith et un ami m’a offert La Papeterie Tsubaki d’Ogawa Ito, après une discussion sur les romans feel good justement. J’ai hâte de parcourir les pages de ces derniers. Je sens que la qualité littéraire sera au rendez-vous et qu’on va monter d’un pallier au niveau stylistique.

Et vous, c’est quoi vos lectures feel good de l’été ?

Oct 8, 2022 - Coups de coeur, livres    1 Comment

Never let me go, Auprès de moi toujours, Placebo et Kazuo Ishiguro

Si vous me côtoyez, vous savez que, régulièrement, j’ai des lubies artistiques qui sont du genre monomaniaques, quitte à saouler mon entourage, même si je me contiens. Cette année, j’ai eu une phase Buffy, The Vampire Slayer qui a duré plus de deux mois, voire trois, d’ailleurs, j’en ai écrit un article que je n’ai jamais publié sur la censure des chaînes françaises, peut-être un jour… Mais ce n’est pas le sujet.
Puis, depuis le mois de juin, je suis retombée dans les bras accueillants (ou pas, c’est vous qui voyez) de Placebo.

Placebo, Never let me go

Never let me go, Placebo

J’avais mis de côté ce groupe au moment de leur quatrième album, Sleeping with ghosts parce que je ne me retrouvais plus dans leur musique ni dans l’arrogance de leur chanteur, alors j’ai mis de côté. Presque 20 ans… Pourtant, j’avais été bluffée par leur premier album éponyme, puis par Without you I’m nothing et Black market music m’avait bousculé par quelques titres extraordinaires. J’adorais leur côté hors norme, le jeu des genres, l’énergie de leur musique, leurs expérimentations, jusque l’année 2003.
Et en juin de cette année, je ne sais pas d’où c’est venu, j’ai ressenti comme un appel à réécouter leur musique. Oui, ça fait un peu mystique dit comme ça, mais je n’avais aucune raison de revenir vers eux à ce moment-là, je n’ai aucune explication. Dans ma tête, j’ai entendu leur musique, alors je me suis remise à écouter. J’avais besoin d’énergie pour sortir mon premier livre, La Légende de la Méduse, et leur musique me l’a offerte et continue de me l’offrir. Je pense que ce livre, celui qui arrive pour la fin de l’année et mon podcast créatif, le Jardin des Délices n’auraient jamais vu le jour sans cette pulsation énergétique.
Assez rapidement, j’ai appris que le groupe venait de sortir un nouvel album : Never let me go et j’ai été d’emblée conquise. Le groupe a évolué, et je me retrouve à nouveau dans leur choix musicaux et certains de leur textes. Cet album m’a littéralement avalée pendant plusieurs semaines. Il m’a scotchée, d’abord par sa richesse musicale, plutôt surprenante, mais aussi par ses textes singuliers, parfois complexes. Alors, aujourd’hui, Brian Molko prend moins la plume pour parler de sexe ou de drogues (quoique), oui, mais il aborde des sujets tout autant intéressants et qui me touchent particulièrement : l’éco-anxiété et le retour à la Terre (« Try better next time »), la surveillance accrue par les proches et moins proches, les médias, l’autorité… (« Surrounding by spies »), David Bowie, la mort et la violence policière (« Happy birthday in the sky »), le mal-être et l’envie de changer de vie, de disparaître (« The Prodigal », « Chemtrails », « Went Missing »)… Bref des choix d’actualité, pour quelqu’un qui se force à s’adapter à la vie dans une société occidentale bancale et malade et qui réveille l’éternelle question : pourquoi vouloir s’adapter à une société malade ? Qui est le plus malade ? Le marginal ou celui qui s’adapte à la société malade ?

Year Zero, Nine Inch Nails

Alors forcément, j’ai été envoûtée et je ne peux que vous conseiller de jeter une oreille attentive ne serait-ce qu’au morceau qui ouvre l’album, « Forever Chemical », à sa harpe (si je ne me trompe pas) distordue et à sa lourdeur indus. Clairement, à l’écoute de cet album, avec les clips, et le nouveau look du chanteur, j’ai eu une réminiscence de mes années Nine Inch Nails (« The perfect drug », pour le look et l’album concept Year Zero).
Véritable objet d’art, cet album a un artwork soigné, c’est d’autant plus rare de nos jours que ça mérite grandement d’être noté, et qui donne vraiment envie de posséder le disque. Et tout ça stimule mon esprit créatif et me donne envie de crier : « Art is resistance !« , comme toujours.

Kazuo Ishiguro, Auprès de moi toujours

Auprès de moi toujours, Kazuo Ishikuro

J’aime beaucoup les groupes qui poussent à la réflexion jusqu’à proposer des références littéraires (les livres, c’est ma vie, mon obsession, sans eux je ne suis rien). Donc, naturellement, en bonne curieuse qui se respecte, je vais creuser un peu et aller lire les références quand j’en ai l’occasion et surtout le temps. Là, j’avoue, le livre de Kazuo Ishiguro, Auprès de moi toujours…, m’a pris beaucoup plus de temps de lecture que prévu à cause d’un mois de septembre très chargé en réécriture. Pourtant, la lecture est d’une fluidité rare. Et j’adore les récits où la subtilité du fantastique (plutôt SF ici) vous emporte sans que vous ne vous en rendiez compte (mention spéciale à Mélanie Fazi dont les nouvelles fantastiques embrasent mon cœur et mon esprit à chaque lecture grâce à cette subtilité délicate, ainsi qu’au livre mémorable de Marlen Haushofer, Le Mur invisible). Mais nous embarquons d’abord, ici, dans une histoire d’amitié des plus réalistes que l’on suit par flashbacks. Les incursions dans le temps présent, laisse un goût amer qui ronge les entrailles. C’est plutôt étrange, parce que cette sensation est amenée par un seul mot : « don ». Là où on pourrait y voir quelque chose de débonnaire, il n’y a qu’illusion, douleur et sacrifice. On se doute, mais rien n’est expliqué avant la fin… Alors, je n’irai pas plus loin, je n’ai pas envie de vous gâcher le plaisir de la découverte via la lecture et le choc scénaristique. J’ai juste envie de parler de cette chanson qui hante le récit et qui a donné son nom à l’album de Placebo, « Never let me go », « Auprès de moi toujours » en français. Cette chanson entêtante. Celle qui vous rassure et que vous fredonnez pour vous réconforter. La chanson doudou. Elle devient presque un péché mignon qu’on se garde pour soi quand on est seul.e et dans laquelle on se love. On en a toustes de ces chansons-là. Elles n’ont pas besoin d’être extraordinairement originales, mais elle nous parle directement au cœur, cette énergie universelle qui nous traverse toustes. L’énergie la plus importante. L’énergie immuable.
J’ai mis tant de temps à lire ce livre qu’il m’a accompagnée comme un ami pendant plusieurs semaines et ses personnages me manquent. Il y avait longtemps que je n’avais pas eu le reading blues, tiens…
Et puis, cette chanson tisse un récit différent dans plusieurs esprits. Les protagonistes qui lui sont confrontés créent chacun une histoire différente en fonction des émotions liées à la chanson et c’est tellement merveilleux de pouvoir écrire un texte qui permet à chacun d’avoir sa propre rencontre avec les mots, avec son propre imaginaire. C’est un véritable aboutissement pour un parolier, je pense.

Art is resistance flag

Never let me go : le cri de tous les livres

Ce titre, « Never let me go », exprime autre chose pour moi qui suis depuis toujours fascinée par les livres. Il est lié à ma bibliothèque (certains parleront même de collection tant je les accumule et leur accorde d’importance dans ma vie). C’est le cri que je crois entendre dès que je fais du tri et plus particulièrement dès que j’essaie de vider ma bibliothèque. Chacun d’entre eux me hurle « Never let me go », traduction littérale : ne me laisse jamais partir. Comme s’ils avaient tous leur volonté propre et le désir de rester dans le carcan chaleureux de mes étagères. Auprès de moi toujours… Quand je me suis séparée de certains d’entre eux, je l’ai regretté. Et c’est le cri que moi je formule pour chacun d’entre eux. J’ai toujours dit qu’on m’enterrerait avec mes livres, les miens et ceux de ma bibliothèque. Ils sont mes compagnons, mes amis.
J’irai même encore plus loin en vous disant que ce cri, « Never let me go », est celui de toutes les créations (reconnues ou non), elles s’accrochent toutes aux doigts et au cœur de la personne qui lui a donné sa substance dans la matière pour l’offrir au monde. Tant d’heures passés pour lâcher prise… et let it go… l’offrir au monde.
Alors, elle ne nous appartient plus, elle est vôtre, elle est nôtre, elle est tout.

Art is resistance!

P.S. : Tu la sens poindre légèrement la fixette Nine Inch Nails, là ? 😀

Art is resistance
Juil 7, 2022 - livres    No Comments

Stupeur, ou le début de la police scientifique

Namaste les Dévoreureuses de Mondes,

Aujourd’hui, j’ai envie de vous parler d’une lecture particulière et d’une maison d’édition que j’affectionne beaucoup. Oui, certain.e.s d’entre eux vous diront sûrement que je ne suis pas très objective, mais j’ai vraiment envie de mettre en avant le travail de ces éditrices de talent, parce qu’il me touche. Elles savent choisir des textes qui me parlent et m’intéressent.

Logo de Lucca Éditions

Lucca édition ou l’immersion dans la vulgarisation scientifique par l’imaginaire.

Oui, lier la littérature jeunesse et l’imaginaire à la vulgarisation scientifique, c’est possible, et quoi de mieux qu’apprendre en s’amusant. C’est un peu l’idée de cette maison d’édition de Lille et je suis à chaque fois en joie de découvrir leurs nouvelles publications même si, comme chacun.e, j’ai mes favoris et mes sciences préférées.
Alors non, il ne s’agit pas uniquement de sciences dures (mathématiques, physique…), les éditrices choisissent également des textes en relation avec les sciences humaines (histoire, anthropologie…) et cette variété de thématiques n’a d’égale que l’hétérogénéité des cibles de leurs publications : du lectorat jeune via des albums magnifiquement illustrés au young adult en passant par des romans plus courts dédiés aux lecteurices débutants. Et je ne vous parle même pas de la multiplicité des genres : science-fiction et space opera, policier, aventure s’y côtoient. De quoi satisfaire un large lectorat. Allez jeter un œil à leur catalogue, vous vous ferez vite un avis.

Stupeur, ou la découverte des balbutiements de la police scientifique au début du XXe siècle.

20220707 - Couverture du livre Stupeur par Julie Chibbaro

Résumé

Prudence Galewski, immigrée juive de 16 ans, s’ennuie à l’école de jeunes filles. Elle qui ne rêve que de sciences et s’interroge sur à peu près tout et, en particulier, sur cet agglomérat de petites choses qui nous constitue, les cellules. L’été dernier, elle a même confirmé ce rêve en devenant l’assistante de sa mère qui exerce en tant que sage-femme. À l’école de jeunes filles, elle n’y apprend qu’à devenir une future épouse ou, au mieux, une secrétaire, alors elle désespère. Mais les temps sont durs, l’argent se fait rare. Alors Prudence décide de chercher du travail et ça tombe bien, le poste idéal est à sa portée : assister Mr Soper, ingénieur sanitaire, qui enquête sur une étrange épidémie à Long Island.

Petite analyse

Ce livre nous propose une immersion dans l’investigation scientifique. Construit comme un polar, nous partons à la recherche du premier patient zéro de notre histoire : il contamine, mais n’est pas malade. Vous l’aurez compris, ce livre est basée sur une histoire vraie. La majorité des protagonistes ont réellement existé. Cependant, la création du personnage de Prudence offre à la narration une touche romanesque qui nous permet d’entrer au cœur de l’aventure. Nous y suivons ses questionnements d’adolescente hors-norme, qui ne colle pas au moule dans lequel une femme devrait être éduquée, surtout à cette époque, et le début de ses émois amoureux. Prudence est une héroïne à la fois intelligente, singulière et féministe, ce qui facilite l’entrée dans le roman.
Je n’aime pas vraiment la littérature jeunesse qui prend les enfants pour des abrutis, en simplifiant le style à outrance ou en censurant des éléments narratifs. En général, j’ai également du mal avec les récits à la première personne, ils sont de plus en plus fréquents et ce choix narratif, bien que facile d’accès pour la personne qui lit le récit, n’est pas toujours judicieux. Il donne parfois l’impression que l’auteurice saute sur la simplicité au lieu de réfléchir aux différents points de vue de l’histoire.
Pourtant, aucun souci pour ce livre. Avec Stupeur, j’ai pu constater que le travail de traduction est ciselé à la perfection. La plume de la traductrice rend vraiment hommage au travail de l’autrice : le jeu avec les temps est très intéressant et donne une véritable continuité chronologique au récit. Elle permet de visualiser parfaitement la jeune héroïne qui s’assoit le soir pour rédiger, raconter sa journée (au passé) et y ajouter ses analyses et questionnements (au présent). Cette temporalité rend réaliste notre façon de percevoir le monde, nos actions et nos interactions, parfois réflexes, et les interrogations qui peuvent surgir plus tard, lorsque nous avons le temps d’y réfléchir posément.
J’ai lu à plusieurs endroits sur le net, les réseaux ou dans divers commentaires, que la cohérence temporelle de ce récit était mauvaise, incompréhensible et j’en ai été fort surprise.
Parfois, je me demande ce que recherchent les lecteurices pour faire des commentaires incendiaires sur un style affûté d’une traduction qui honore le texte de l’autrice de la version originale.
Parfois, je me dis que les lecteurices recherchent de plus en plus la simplicité, comme s’iels allumaient leur télé le soir en mode lavage de cerveau et ça m’attriste, parce qu’à défaut de lectorat, c’est ce genre de très bonnes publications que l’on risque de voir disparaître.

Un bel objet

En plus de son excellent contenu, ce livre est un magnifique objet, garni d’une splendide couverture aux ornements dorés et d’illustrations très bien réalisées, ce qui n’est pas pour me déplaire, puisque j’aime autant regarder, toucher les livres que les lire (ou les sentir). Et les ressentir…

Vous l’aurez compris, Stupeur est une superbe publication de la maison d’édition Lucca Éditions, signée Julie Chibbaro et traduite par Hermine Hémon. Si vous vous intéressez au début des enquêtes scientifiques, c’est le roman policier historique qu’il vous faut.

Informations techniques

Autrice : Julie Chibbaro
Traductrice : Hermine Hémon
Illustrations : Jean-Marc Supervisée Sovak et Louis Diallo
Couverture : Noëmie Chevalier
Chez Lucca Éditions

N’hésitez pas à me dire en commentaires si vous avez aimé ce livre.
À bientôt pour de nouvelles aventures, d’ici là, prenez soin de vous.

Juin 22, 2022 - livres    No Comments

Faim avide – Livres émois 2

Namaste les Dévoreur.euse.s de Mondes,

Eh bien, nous y revoilà. Chaque année j’essaie de résister, chaque année j’essaie d’éviter au maximum ces lieux de débauches qui me séduisent et me happent totalement le porte-monnaie. Ben oui, il faut bien être honnête, la consommation de livres a un coût (tout est relatif) et bien que j’essaie de la limiter, je finis toujours pas craquer sur une histoire passionnante lorsque je mets les pieds dans une librairie, un salon du livres ou pire, une foire aux livres. Je vous le disais dans l’article « Livres émois » : même les médiathèques sont démoniaques pour moi puisque remplies de serpents tentateurs. Imaginez un banquet, un buffet à volonté de mets que vous raffolez et gratuits (ou presque)… Comment résister ? Moi je ne peux pas.

Et s’il n’y avait que ces lieux ! Le web regorge de livres de seconde main qui n’attendent qu’une seule chose : être adoptés pour se lover dans le creux douillet d’une étagère accueillante.

Soupirs…

Je ne me contrôlerai donc jamais…

Un début d’année raisonnable

C’est toujours lui qui profite des livres en premier

L’année avait pourtant bien commencé avec une résolution de plus et l’objectif de lire beaucoup plus que je n’achète, dix fois plus… hum. Sans commentaire. Janvier, février passent et je tiens le coup. Et puis Mars débarque, suivi d’avril et surtout de mai et juin. Voilà quatre mois inoubliables pour mon compte bancaire, surtout les deux derniers ! Mais laissez-moi vous expliquez à quel point je suis incapable de tenir cette fichue résolution…

Les deux premiers mois de cette année, j’ai su prendre le temps de réfléchir avant chaque achat au point que j’ai réussi, par trois fois, à entrer dans une librairie et à en ressortir les mains vides. Si vous me connaissiez, vous sauriez que c’est un exploit, notamment parce que j’ai l’impression de décevoir le/la libraire lorsque je fais ça. En ce mois de janvier mon premier argument « As-tu vraiment besoin de ce livre actuellement ? » tenait bon et je n’avais pas eu besoin d’argumenter avec moi-même. Tout allait bien.

Vint le mois de février et l’envie de terminer des séries/sagas de livres dont j’avais les premiers tomes. Après quelques passages sur des sites de ventes d’occasion (vive la second main – mon deuxième argument pour contrer l’achat d’un livre neuf), je craque et m’achète la fin de la saga de La Communauté du Sud de Charlaine Harris (vous savez, ces livres qui ont inspiré la splendide série True Blood, créée par Alan Ball) en vf et l’intégrale en vo… ben oui, il y avait une occasion à ne pas rater…

Oui, ces deux mois ont été doux comparés aux suivants, grâce aux sites de vente d’occasion…

Avril, la foire aux livres de Paimpont

Première partie des livres choisis à Paimpont

Alors là, pour parler buffet à volonté et quasiment gratuit, on y va ! Et comme j’ai des goût hyper éclectiques, je me suis lâchée. Voyez vous-même, près d’une trentaine de livres pour une modique somme. Le plus onéreux valait 2€. Bref…

La suite des livres dénichés à Paimpont

Une foire aux livres, pour moi, c’est une plus grande tentation encore qu’une maison de pain d’épices pour Hansel et Gretel, ou qu’un crocodile perdu au milieu d’une horde de fourmis magnans affamées. J’achèterais tout ! Alors, je respire, je me concentre et tente de ne prendre que l’essentiel. Mais c’est quoi l’essentiel, quand on est curieux et insatiable de nouveautés (et pas que ; ma mémoire de poisson rouge me permet de relire un livre déjà lu plusieurs fois…)

Mai, le salon des Forges Obscures (salon du polar de Trith Saint-Léger), deuxième édition

Le butin lors des Forges Obscures

Alors, ce n’est pas la thématique qui m’attire le plus en salon, je suis, de loin, beaucoup plus habituée aux salons de l’imaginaire, bien que je lise des polars aussi, en bonne fan d’Arsène Lupin, le contraire serait dommage. Mais là, le salon des Forges Obscures est organisé par deux ami.e.s de longue date et j’avais une nouvelle fois envie de marquer le coup en allant les soutenir en chair et en os. Surtout qu’après deux années de crise sanitaire, la deuxième édition a eu bien du mal à voir le jour. Alors quelle joie de parcourir ce théâtre animé de voix multiples de semeur.euse.s d’énigmes, et, il faut le dire, de cadavres, parfois bien mystérieux. L’ambiance est fun et légère, malgré la noirceur de la thématique…

Mise en scène macabre au salon des Forges Obscures

Les auteurs de maisons d’édition côtoient les auto-édités de façon égalitaire. Pas de jaloux. Pas de concurrence. Que du partage. De toute façon, toutes les ventes passent par l’unique libraire des lieux. J’y ai donc eu la joie de rencontrer Caroline Carton et ses thrillers fantastico-horrifiques et Frédéric Lyvins, qui joue dans la classe horreur et pulp jusqu’à danser de la plume avec Graham Masterton himself. Question célébrité, cette année, l’invité d’honneur n’est autre que le timide Franc Thilliez à la plume toujours affûtée.

L’affiche de la deuxième édition du salon des Forges Obscures

Je m’en sors avec six livres achetés et ma comparse avec trois – et c’est sans compter avec les quatre qu’elle m’a offert plus tard (ils ne venaient pas du salon ceux-là…) De tout cela, j’ai déjà dévoré la moitié puisque j’étais en vacances à ce moment-là, et je ne me suis pas privée d’en lire deux des trois sélectionnés par ma comparse, dont l’excellent Enfermé.e, de Jacques Saussey.

Les deux livres acquis par ma comparse que j’ai déjà lus

Merci à Élo et Seb’ pour ce chouette, mais trop court moment. J’aurais vraiment aimé pouvoir assister à la table ronde. Promis, l’année prochaine, je la fais plus longue !

Juin, le salon des Étonnants Voyageurs

C’était la première que je faisais un salon de cette envergure et je ne suis vraiment pas sûre de renouveler l’expérience, malgré de chouettes rencontres. Déjà l’entrée est chère (heureusement que j’avais une invitation – merci Lucca Éditions) et puis : trop de stands, trop de monde, trop de bruit… donc trop de stimulations pour moi = saturation sensorielle. Youpi ! J’étais ravie de retrouver le calme de ma maison après ce salon. Oui, ça fait plaisir de voir tout ce brassage de genres, styles, mais ce n’est clairement pas ma came, d’autant plus que le lieu est une véritable étuve pas aérée.

Les livres de Lucca Éditions trouvés aux Étonnants Voyageurs

En tout cas, comme d’hab’ avec la littérature de l’imaginaire, de bons échanges avec Lucca Éditions et ses éditrices, Gulf Stream (éditrices et autrices), avec Critic (libraires et éditeurs), avec Transboréal, avec Pierre Bordage ou Morgan of Glencoe qui ne tarit pas de conseils pour l’autrice en arbres que je suis. Bon… Je n’étais pas venue seule et, à nous deux, nous repartons avec pas moins de onze livres >_<, mais cette fois, je ne suis pas en vacances, alors ces mondes-là devront attendre patiemment avant que je les déguste avidement.

Vous reprendrez bien encore un p’tit livre, n’est-ce pas ?

Tout cela pour dire que les livres sont ma vie, je pourrais passer ma vie à lire et grignoter ces mondes réels et imaginaires avec délectation. C’est la passion la plus dévorante que j’aie et vue ma compulsion à l’achat, elle n’est pas prête d’être étouffée, malgré ma volonté à vouloir absolument freiner ma consommation envahissante.

N’allez pas croire que ces livres sont des caprices. Non, non. Chacun renferme un univers, un monde prêt à m’accueillir, prêt à être dévoré goulûment. Il n’attend que le bruit du froissement de ses propres pages et du souffle haletant du lecteur vorace de mots/maux ! Et j’aime tant me projeter dans ces moments de pause dans le quotidien, loin de notre dure réalité. C’est de toute façon ce que je clame dans « Livres émois » et ce n’est pas près de changer, même si je ferai tout pour me restreindre au maximum…. Si je compte, j’en suis aujourd’hui à plus de 80 livres en 6 mois. Mais quand aurai-je le temps de tout lire ? Quand ? Les journées ne sont pas assez longues. La vie non plus…

Comme le tweetait si bien Stephen King le 18 juin 2022 : « So much to watch. So much to read. So little time. » Alors, je vais rester zen… je l’espère… au moins quelques semaines. 😉

Juin 13, 2022 - livres    No Comments

Livres émois

Namaste les Dévoreur.euse.s de Mondes,

Les livres et moi, les livres émois. Les accumuler, les sélectionner. Les caresser, les dévorer. Les empiler, les ranger. Les observer, les aimer.

J’adore être entourée de livres et je les accumule. J’achète. Parfois compulsivement. Ça pourrait ressembler à une collection, mais c’est bien plus que ça. Chacun d’entre eux est un compagnon passé, présent ou futur. C’est tout un tas d’imaginaires à découvrir, d’amis à rencontrer, une multitude d’univers à parcourir, des aventures à vivre par procurations, autant de Mondes à dévorer.

D’une certaine façon, je me projette dans l’univers de l’auteurice dès que j’effleure une couverture qui m’interpelle. Ses mots s’immiscent dans ma peau et pénètrent mon corps. Ils m’affament et me dévorent de l’intérieur avant même que je n’ai pu les effeuiller.

D’année en année, mes PAL s’accroissent… débordent…

Depuis que je suis en âge de faire mes propres achats en solitaire, j’achète compulsivement des livres. J’évite d’entrer dans une librairie autant que de jouer à des jeux vidéos. Si je franchis le pas, un effort extrême est nécessaire pour que je parvienne à résister. Achat ou jeu.

Une partie de ma collection des fleurs du mal

Parfois, j’ai focalisé mes achats sur un ouvrage en particulier. Ainsi, je possède plus d’une dizaine d’exemplaires des Fleurs du Mal, un peu moins de Dracula… et probablement plusieurs centaines de livres sur les vampires (ma grande passion ; même si je n’en retiens pas grand chose). C’est mon truc. En ce moment, j’évite même de craquer sur l’œuvre complète de Maurice Leblanc, Arsène Lupin (The love of my life), afin que mes proches ne soient pas saturés de mes lubies, si je puis les nommer ainsi. Et puis, les livres, ça prend de la place…

Un buffet à volonté…

Imaginez-moi dans une médiathèque : le paradis… il n’est plus question de compte en banque, c’est un buffet à volonté quasiment gratuit. Une frénésie d’emprunts me gagne régulièrement et je ressors de la médiathèque avec des livres à ne plus savoir en porter, que je rendrai sans doute en retard…

La seule frustration, c’est que je suis obligée de retourner chacun de ceux qui m’ont émerveillée. Et il y en a tellement que je me retiens de les acheter. J’essaie de me focaliser sur ceux que je ne trouve pas près de chez moi, sur les nouveautés, sur des auteurs peu médiatisés, des petites maisons d’édition. Mais je finis toujours par craquer.

Des piles à lire à n’en plus finir

Pour vous dire, j’ai déjà acheté plus de 80 livres en même pas 6 mois… la majorité d’occasion, c’est sûr, mais quand même… Et qu’en est-il du temps pour les lire ?

Quand j’étais ado, ma pile à lire (PAL pour les initiés) se comptait en livres, quelques années plus tard, en nombre de cartons, aujourd’hui, elle se compte en nombre d’étagères. Comment trouverais-je le temps de lire tout cela avant ma mort, en plus des nouveaux à découvrir ?

Alors, chaque année je me défie pour éviter la surconsommation (parce que les livres, c’est aussi du papier, des arbres qu’on abat pour notre plaisir) : lire plus que j’achète (reçois ou troque), lire deux fois, trois plus…

Cette année, je souhaitais me contraindre d’acheter un livre lorsque j’en aurais lu dix… autant dire que l’objectif va être très compliqué à atteindre, à moins de ne lire que des mangas ou des bandes dessinées (oui, ce sont des vrais livres, j’ajouterais que ce sont des livres qui aident à la focalisation de l’attention, lorsqu’on a un esprit qui file, devient rapidement insaisissable, parce que vite parasité par tout un tas de pensées).

Soupirs…

Amours inconditionnelles

Alors oui, beaucoup ne comprennent pas que j’amasse ces livres et se gaussent de mes amis imaginaires et de papier, parce que j’aime me préparer des PAL et me projeter dans la lecture des mondes de ma nouvelle pile. J’anticipe les émotions, le bonheur que je ressentirai à parcourir leurs pages. Pour moi, ils sont un réconfort permanent, un refuge éternel, ils m’aident à affronter le monde, m’aident à expérimenter des vies que je ne vivrai jamais (vive les dragons). Ils me rassurent et je plonge régulièrement dans une boulimie qui me fait oublier l’existence et les êtres de chair et de sang qui m’entourent. Chaque être de papier devient un ami réconfortant ou un ennemi à combattre pour la journée…

Quand je regarde les volumes qui tapissent ma chambre, mon bureau ou mon salon, et que je songe à chacun d’entre eux, je m’imagine en train de caresser leur page, de leur accorder le temps qu’ils réclament tous. Pourtant, je sais qu’au rythme où je les lis, où je les reçois, où je les emprunte, je ne réussirai jamais à tous les lire avant ma mort. Alors mon cœur se tord comme si j’allais délaisser ceux que je n’aurai pas dévorés… comme un ami abandonné, livré à lui-même, sur le bord du chemin.

Peut-être pourrais-je les emporter avec moi dans l’autre monde. Ils me feront de fiers compagnons dans l’au-delà et je serai, à tout jamais, la gardienne de leurs maux…