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Juil 7, 2022 - livres    No Comments

Stupeur, ou le début de la police scientifique

Namaste les Dévoreureuses de Mondes,

Aujourd’hui, j’ai envie de vous parler d’une lecture particulière et d’une maison d’édition que j’affectionne beaucoup. Oui, certain.e.s d’entre eux vous diront sûrement que je ne suis pas très objective, mais j’ai vraiment envie de mettre en avant le travail de ces éditrices de talent, parce qu’il me touche. Elles savent choisir des textes qui me parlent et m’intéressent.

Logo de Lucca Éditions

Lucca édition ou l’immersion dans la vulgarisation scientifique par l’imaginaire.

Oui, lier la littérature jeunesse et l’imaginaire à la vulgarisation scientifique, c’est possible, et quoi de mieux qu’apprendre en s’amusant. C’est un peu l’idée de cette maison d’édition de Lille et je suis à chaque fois en joie de découvrir leurs nouvelles publications même si, comme chacun.e, j’ai mes favoris et mes sciences préférées.
Alors non, il ne s’agit pas uniquement de sciences dures (mathématiques, physique…), les éditrices choisissent également des textes en relation avec les sciences humaines (histoire, anthropologie…) et cette variété de thématiques n’a d’égale que l’hétérogénéité des cibles de leurs publications : du lectorat jeune via des albums magnifiquement illustrés au young adult en passant par des romans plus courts dédiés aux lecteurices débutants. Et je ne vous parle même pas de la multiplicité des genres : science-fiction et space opera, policier, aventure s’y côtoient. De quoi satisfaire un large lectorat. Allez jeter un œil à leur catalogue, vous vous ferez vite un avis.

Stupeur, ou la découverte des balbutiements de la police scientifique au début du XXe siècle.

20220707 - Couverture du livre Stupeur par Julie Chibbaro

Résumé

Prudence Galewski, immigrée juive de 16 ans, s’ennuie à l’école de jeunes filles. Elle qui ne rêve que de sciences et s’interroge sur à peu près tout et, en particulier, sur cet agglomérat de petites choses qui nous constitue, les cellules. L’été dernier, elle a même confirmé ce rêve en devenant l’assistante de sa mère qui exerce en tant que sage-femme. À l’école de jeunes filles, elle n’y apprend qu’à devenir une future épouse ou, au mieux, une secrétaire, alors elle désespère. Mais les temps sont durs, l’argent se fait rare. Alors Prudence décide de chercher du travail et ça tombe bien, le poste idéal est à sa portée : assister Mr Soper, ingénieur sanitaire, qui enquête sur une étrange épidémie à Long Island.

Petite analyse

Ce livre nous propose une immersion dans l’investigation scientifique. Construit comme un polar, nous partons à la recherche du premier patient zéro de notre histoire : il contamine, mais n’est pas malade. Vous l’aurez compris, ce livre est basée sur une histoire vraie. La majorité des protagonistes ont réellement existé. Cependant, la création du personnage de Prudence offre à la narration une touche romanesque qui nous permet d’entrer au cœur de l’aventure. Nous y suivons ses questionnements d’adolescente hors-norme, qui ne colle pas au moule dans lequel une femme devrait être éduquée, surtout à cette époque, et le début de ses émois amoureux. Prudence est une héroïne à la fois intelligente, singulière et féministe, ce qui facilite l’entrée dans le roman.
Je n’aime pas vraiment la littérature jeunesse qui prend les enfants pour des abrutis, en simplifiant le style à outrance ou en censurant des éléments narratifs. En général, j’ai également du mal avec les récits à la première personne, ils sont de plus en plus fréquents et ce choix narratif, bien que facile d’accès pour la personne qui lit le récit, n’est pas toujours judicieux. Il donne parfois l’impression que l’auteurice saute sur la simplicité au lieu de réfléchir aux différents points de vue de l’histoire.
Pourtant, aucun souci pour ce livre. Avec Stupeur, j’ai pu constater que le travail de traduction est ciselé à la perfection. La plume de la traductrice rend vraiment hommage au travail de l’autrice : le jeu avec les temps est très intéressant et donne une véritable continuité chronologique au récit. Elle permet de visualiser parfaitement la jeune héroïne qui s’assoit le soir pour rédiger, raconter sa journée (au passé) et y ajouter ses analyses et questionnements (au présent). Cette temporalité rend réaliste notre façon de percevoir le monde, nos actions et nos interactions, parfois réflexes, et les interrogations qui peuvent surgir plus tard, lorsque nous avons le temps d’y réfléchir posément.
J’ai lu à plusieurs endroits sur le net, les réseaux ou dans divers commentaires, que la cohérence temporelle de ce récit était mauvaise, incompréhensible et j’en ai été fort surprise.
Parfois, je me demande ce que recherchent les lecteurices pour faire des commentaires incendiaires sur un style affûté d’une traduction qui honore le texte de l’autrice de la version originale.
Parfois, je me dis que les lecteurices recherchent de plus en plus la simplicité, comme s’iels allumaient leur télé le soir en mode lavage de cerveau et ça m’attriste, parce qu’à défaut de lectorat, c’est ce genre de très bonnes publications que l’on risque de voir disparaître.

Un bel objet

En plus de son excellent contenu, ce livre est un magnifique objet, garni d’une splendide couverture aux ornements dorés et d’illustrations très bien réalisées, ce qui n’est pas pour me déplaire, puisque j’aime autant regarder, toucher les livres que les lire (ou les sentir). Et les ressentir…

Vous l’aurez compris, Stupeur est une superbe publication de la maison d’édition Lucca Éditions, signée Julie Chibbaro et traduite par Hermine Hémon. Si vous vous intéressez au début des enquêtes scientifiques, c’est le roman policier historique qu’il vous faut.

Informations techniques

Autrice : Julie Chibbaro
Traductrice : Hermine Hémon
Illustrations : Jean-Marc Supervisée Sovak et Louis Diallo
Couverture : Noëmie Chevalier
Chez Lucca Éditions

N’hésitez pas à me dire en commentaires si vous avez aimé ce livre.
À bientôt pour de nouvelles aventures, d’ici là, prenez soin de vous.